L’exploitation sexuelle, en raison de sa clandestinité, est difficile à étudier. Les statistiques officielles, fournies par les services de police, ne reflètent qu’une partie de la réalité, sous-estimant ainsi l’ampleur du phénomène. Néanmoins, il est indéniable que cette problématique est au cœur des préoccupations. Les différents acteurs·trices·s gravitant autour des jeunes sont de mieux en mieux outillé·e·s pour détecter les situations d’exploitation sexuelle chez les jeunes, ces derniers y étant particulièrement vulnérables. 

Le projet Pile ou face est le fruit d’une analyse de besoins approfondie sur la prévention de l’exploitation sexuelle, lancée en 2021, en collaboration avec notre Chaire de recherche. Cette étude a permis d’identifier les concepts clés de prévention à partir de la littérature scientifique et de plusieurs entretiens auprès de 15 professionnel·le·s oeuvrant auprès des jeunes à risque et de 7 jeunes survivantes, ainsi que les défis et les conditions de succès pour l’implantation et l’évaluation du projet. 

Trois grandes catégories d’infraction sont associées à l’exploitation sexuelle : le proxénétisme et la traite de personnes, la marchandisation de services sexuels ainsi que la pornographie juvénile et la publication d’images intimes de personnes mineures. La proportion de personnes victimes d’âge mineur varie quant à elle selon le type d’infractions. 

En ce qui a trait au proxénétisme et à la traite de personnes, les données colligées par les forces de l’ordre québécoises permettent d’établir qu’en 2020 plus du tiers (36,4 %) des personnes victimes n’avaient pas encore 18 ans au moment où le crime est survenu .

Lancé à l’été 2023, Pile ou face répond de manière proactive aux besoins spécifiques des adolescent·e·s âgé·e·s de 12 à 17 ans, qui sont particulièrement exposé·e·s aux risques d’exploitation sexuelle et de traite de personnes. Ce projet pilote, mis sur pied par Marie-Vincent, vise à enrichir les connaissances et à améliorer le soutien des professionnel·le·s afin de favoriser l’autonomisation des jeunes à risque. Il comprend une série de six ateliers élaborés par Marie-Vincent, couvrant des thèmes comme l’estime, la connaissance et l’affirmation de soi, les relations saines et égalitaires ainsi que des scénarios de recrutement et les moyens de s’en prémunir. Pour appuyer ces ateliers, divers outils ont été développés, comme un guide d’animation, deux modules de formation, un journal de bord, un court métrage et un jeu de cartes sur les mythes et les réalités.

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Le 1er février dernier, c’est avec fierté que nous avons finalisé l’implantation du projet à l’Auberge du Cœur Le Baluchon, un organisme communautaire autonome de Saint-Hyacinthe, accueillant des jeunes âgés de 12 à 23 ans en situation de difficulté. Nous avons eu le privilège de travailler en partenariat avec ce milieu de vie chaleureux et accueillant et nous sommes reconnaissantes de l’implication et de la mobilisation de leur équipe. Plaçant le bien-être des jeunes au cœur de leurs préoccupations, elles ont suivi avec intérêt les deux modules de formation et ont animé avec succès les six ateliers auprès des jeunes. 

« Même si je pensais en connaître déjà sur le sujet de l’exploitation sexuelle, j’ai appris beaucoup de nouvelles choses. J’ai aimé qu’on ne parle pas seulement d’exploitation sexuelle, mais aussi d’autres sujets qui nous touchent comme les relations saines/malsaines, les situations à risque, comment se protéger, etc. »
– Jeune ayant participé au projet. 

« En tant qu’intervenantes, nous avons beaucoup apprécié participer au projet pilote Pile ou face. Nous avons aimé la façon dont le projet est construit : aborder avec les jeunes des thématiques qui les rejoignent, en allant graduellement vers le sujet de l’exploitation sexuelle. Les différents thèmes abordés (estime et affirmation de soi, relations saines/malsaines, signaux à surveiller, etc.) nous ont permis d’initier des conversations pertinentes et enrichissantes avec les jeunes du groupe. Nous avons eu la chance de pouvoir tester le projet et de pouvoir l’adapter aux particularités des jeunes qui l’ont vécu avec nous. C’est un projet vraiment très bien construit et surtout plus que nécessaire dans la prévention de l’exploitation sexuelle. »
Ariane et Judee, intervenantes au Baluchon et animatrices du projet Pile ou face

L’implantation réussie du projet Pile ou face à l’Auberge du Cœur Le Baluchon nous rappelle avec éloquence que la prévention de l’exploitation sexuelle n’est pas seulement un objectif, mais un devoir collectif pour bâtir une communauté protégeante autour de nos jeunes. 

C’est en unissant nos forces que nous pouvons mieux prévenir l’exploitation sexuelle et renforcer la résilience face à cette problématique.